Il s’agit d’une table, une simple table, une table qui nous fait approcher de Dieu… Notre table de cuisine était hors d’usage mais en acheter une, il ne fallait même pas y penser : pas d’argent pour cela. J’ai dit à mon fils : « Pour Maman et toute la famille, nous allons en fabriquer une avec trois fois rien. »
Avons récupéré de vieilles voliges destinées au brûlis, trouvé quelques madriers non équarris ; avons poncé, scié, vissé, sué, mesuré, mortaisé, ajusté, fatigué… Une table, certes rustique mais très sympa et très tendance, a surgi du néant.
Vous savez, on dit souvent que la société de consommation éloigne de Dieu parce que le gavage de biens matériels laisse peu de place au questionnement spirituel. C’est vrai, mais elle a, me semble-t-il, un autre effet pervers peu souligné : en passant de rayons en rayons de supermarchés, nos enfants ne voient plus que des produits finis. Ils ignorent le plus souvent les matières premières qui les composent comme les étapes de leur élaboration. Jamais dans l’Histoire nous n’avons été si éloignés de la genèse des produits.
Or nous approchant au plus près de leur origine, de l’ingéniosité, générosité et parfois abnégation qu’ils ont nécessité, il devient plus aisé de saisir, par transposition, l’extraordinaire puissance, intelligence et bonté de Dieu.
Alors, cette table destinée à toute la famille ? Il a fallu beaucoup d’efforts pour lui donner vie, beaucoup vouloir et persévérer. Grâce à elle, mon fils a approché une certitude : trois fois rien, beaucoup de don de soi et d’amour, le miracle de la création est là.
Ce n’est pas la société de consommation et Dieu n’est pas loin…
Bertrand LETHU