Marthe et Marie

Marthe et Marie

Dans l’Évangile de Luc, Jésus oppose la contemplation de Marie à l’action de Marthe. Quel est le sens de cette scène qui a inspiré les grands peintres de la Renaissance ou le poète Claudel ?

Jésus entre dans le village de Béthanie qui se trouve près de Jérusalem. C’est là qu’habitent ses amis Marthe, Marie (à ne pas confondre avec la Marie, la mère de Jésus) et leur frère Lazare.
Marthe l’invite à entrer chez eux et, en bonne maîtresse de maison, s’active pour lui préparer un repas réussi. Dans le même temps, sa sœur Marie s’assoit pour écouter Jésus mais ne bouge pas le petit doigt pour aider sa sœur.
Soudain, Marthe se fâche en interpellant directement Jésus : « Seigneur, cela ne te fait rien que ma sœur me laisse servir toute seule ? Dis-lui donc de m’aider. »
Jésus lui répond : « Marthe, tu te soucies et tu te donnes du mal mais c’est Marie qui a trouvé la meilleure chose à faire : m’écouter. »

 

 

Marthe et Marie
Marthe et Marie

 

Marthe et Marie : sens du texte

Le contraste entre les deux sœurs s’attache à présenter Marie comme la disciple parfaite, assise au pied du Seigneur pour recevoir son enseignement. La posture de l’élève au pied de son maître est classique dans la tradition juive, ce qui est plus étonnant est que l’élève est une femme. Il faut ici relever que de fait Jésus encourage les femmes aussi bien que les hommes à suivre son enseignement.
L’attitude de Marthe en maîtresse de maison affairée est également conforme à l’attitude des femmes disciples. Mais surtout, elle veut que sa sœur agisse comme elle. Elle en est tellement persuadée qu’elle interpelle Jésus par le mot « Seigneur » car dans son esprit, il ne peut qu’être d’accord avec les priorités qui sont les siennes.
Dans le propos de Jésus, il n’est pas question de mettre en cause le service des tables. En revanche, il affirme une hiérarchie entre les deux attitudes. Il reproche à Marthe son inquiétude qui va à l’encontre de l’état d’esprit du vrai croyant. Il encourage Marie à faire passer l’écoute de sa Parole avant toute autre considération.
Être disciple de Jésus, c’est choisir l’unique chose nécessaire : aimer le Seigneur de tout son cœur, de toute son âme, de toute sa force. Notons enfin que ce texte affirme qu’une femme peut être disciple du Christ exactement au même titre qu’un homme et non pas cantonnée au service des tables.
L’affirmation selon laquelle « Marie a choisi la meilleure part, elle ne lui sera pas enlevée » s’oppose à l’idée de ceux qui, comme Marthe, ont du mal à accepter qu’une femme écoute la Parole et en soit la servante. Il ne faut pas oublier que la scène se déroule à une autre époque dans laquelle le statut de la femme était différent de celui d’aujourd’hui.

 

 

Marthe et Marie : les personnages principaux

Aux côtés de Jésus-Christ, les deux personnages de ce texte sont bien évidemment Marthe et Marie.

 

 

Marie de Béthanie

C’est la sœur de Marthe et de Lazare. C’est elle qui s’assoit au pied de Jésus pour ne pas perdre un seul des mots qui sortent de sa bouche.
Dans ce texte, Luc met en avant deux comportements spirituels : avec Marthe l’action et avec Marie la contemplation.
Deux autres épisodes des évangiles complètent le portrait de Marie :

  • La mort et la résurrection de Lazare : Lazare est mort et enterré. Marie est chez elle entourée d’amis venus la consoler. Marthe est partie à la rencontre de Jésus. L’échange qu’ils ont eu à propos de Lazare est une révélation : elle a compris qui est Jésus et prévient Marie. Celle-ci le rejoint immédiatement et le nomme « Seigneur ». Comme Marthe, dans sa tristesse, elle lui reproche son absence. Elle pleure et dans sa tristesse conduit Jésus à pleurer lui aussi son ami. Touché par la peine des deux sœurs, Jésus-Christ va ressusciter Lazare.
  • L’onction de Béthanie : Jésus monte à Jérusalem pour les fêtes. Il s’arrête chez ses amis à Béthanie. Alors que Marthe sert le repas (toujours elle…), Marie verse abondamment un parfum sur les pieds de Jésus et les essuie avec ses cheveux. Marie semble pressentir, parce qu’il a ressuscité son frère Lazare, que Jésus, de plus en plus reconnu, est en grand danger. Elle montre par ce geste combien elle l’aime et le respecte. Elle lui dit aussi adieu.
 
Marthe de Béthanie

C’est la sœur de Marie et de Lazare. C’est elle qui s’active en cuisine alors que sa sœur Marie s’assoit au pied de Jésus pour écouter ses paroles.
On retrouve Marthe dans l’Évangile selon saint Jean. Lazare est gravement malade. Marthe et Marie appellent Jésus au secours mais lorsqu’il arrive à Béthanie, Lazare est déjà mort et enterré. A l’annonce de l’arrivée de Jésus, Marthe part à sa rencontre. Elle semble lui reprocher son retard : « si tu avais été ici, mon frère ne serait pas mort. » mais elle ajoute, soulignant la complicité entre Dieu et Jésus : « mais je sais que tout ce que tu demanderas à Dieu, Dieu te l’accordera. ». Jésus lui parle alors de résurrection. En juive fervente, Marthe pense à la résurrection au dernier jour, ce qui n’allège pas sa peine.
Alors Jésus lui dit : « Je suis la résurrection. Celui qui croit en moi, même s’il meurt, vivra » et lui demande « Crois-tu cela ? ». Marthe admet cette révélation et passe alors d’un « je sais » à un « je crois ». Elle reconnait en Jésus le Messie et le Fils de Dieu, source de toute vie. Marthe a proclamé sa foi.

 

 

 

Marthe et Marie : vidéo

Si un texte peut énerver les femmes, et particulièrement les mères de famille, c’est bien celui de la rencontre avec Marthe et Marie.
En effet, Jésus semble donner tort à Marthe qui s’échine à ce que le repas soit bien préparé alors qu’elle demande de l’aide à sa sœur Marie.
C’est pourtant aller un peu vite dans l’interprétation de ce texte et peut-être même commettre un énorme contresens.
C’est ce que nous explique Eric de Nattes, prêtre du diocèse de Lyon : Marthe et Marie – Texte de la Bible, Nouveau Testament – YouTube

 

 

Marthe et Marie en peintures

 
Jésus chez Marthe et Marie, tableau de Tintoretto.
 

 

Tableau de Velasquez représentant Jésus chez Marthe et Marie (1618, National Gallery de Londres)

 

 
Jésus dans la maison de Marthe et Marie par Johannes Vermeer.

 

Marthe et Marie : méditation

La meilleure part, Marie l’a prise. Mais parce que Marthe l’avait délaissée. La meilleure part, c’est de rester assise en écoutant Jésus. Marie l’a compris, Marthe n’a pas su en profiter. Alors qu’elle aurait pu. Pour une fois elle aurait pu laisser ses casseroles et ses habitudes de mettre les petits plats dans les grands, pour profiter de cet instant unique, où elle est invitée, elle, à passer à table. A la table de la Parole de Jésus. Marie est en train de boire cette parole, de s’en remplir le cœur. Les rôles sont inversés. Il est invité à manger, et c’est lui qui offre le repas.
Marthe, Marthe, tu t’inquiètes et tu t’agites pour bien des choses. Une seule est nécessaire. Je te dis bien : nécessaire. Tout ce que tu fais est utile, toute cette activité que tu déploies pour m’accueillir. Une seule chose est nécessaire : ouvrir tes oreilles et ton cœur à ce que je veux t’apporter. Tu t’agites pour faire les choses, tu oublies le sens des choses. Assieds-toi, Marthe, viens rejoindre Marie, viens auprès de moi. J’ai aussi des choses à te dire. Il y a un temps pour tout. Un temps pour courir et un temps pour s’arrêter. S’arrêter pour savoir pourquoi on court. Viens donc, Marthe, prends le temps de goûter la Parole de Dieu. Tes plats n’en seront que meilleurs.

Thierry BRAC de la PERRIERE
Évêque de Nevers

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