Zachée est un riche publicain de Jéricho, collecteur d’impôts et de droits divers sur les denrées importées au service de la puissance occupante (les Romains) et du souverain local.
Lors du passage de Jésus dans sa ville, Zachée, desservi pas sa petite taille, décide de monter sur un sycomore pour voir Jésus ! Ensuite il le reçoit avec joie chez lui et décide de réparer ses torts puis de donner la moitié de ses biens aux pauvres…
Zachée : sens du texte
Une histoire de repas
Un homme, peut-être mal dans sa peau, entend dire qu’un certain Jésus dit et fait des choses extraordinaires de la part de Dieu. Il attire la foule, et Zachée, petit, monte alors sur un arbre pour observer.
Or voilà que Jésus le voit, malgré la foule. « Ça alors, il fait attention à moi ! », se dit Zachée qui a l’habitude d’être regardé avec un certain mépris. Mieux encore, Jésus lui dit : « Je voudrais aller manger chez toi aujourd’hui ».
Les braves gens sont scandalisés. Aux yeux de tous, Zachée est un affreux égoïste qui ne partage jamais rien et qui a escroqué plein de gens ! Il n’est pas fréquentable, surtout par quelqu’un qui se prétend envoyé de Dieu.
Nous ne saurons rien du repas mais voilà qu’à la fin, ce riche se sent touché, transformé et dit « Je vais rendre ce que j’ai volé et je vais partager mes biens ».
Une histoire scandaleuse
Une belle histoire, bien morale, dira-t-on. Pas si morale que ça pour les « gens bien », les gens pieux de l’époque qu’on appelle les pharisiens. Ils expriment leur indignation, car leur morale stricte consiste à ne pas se mêler à tout ce qui est impur et à ne pas se souiller en fréquentant les pécheurs qu’on appelle les publicains. Il s’agit d’une véritable exclusion sociale. Jésus ne pouvait pas l’ignorer. S’il était un saint homme, il se serait bien gardé d’entrer chez Zachée et, pire encore, de manger avec lui.
Une « Bonne Nouvelle »
Si Luc rapporte cette histoire, c’est pour proclamer une bonne nouvelle (c’est le même mot que « évangile ») et une bonne nouvelle qui n’est pas réservée aux « gens bien ». L’amour de Dieu, dont Jésus est porteur, rejoint tout homme quel qu’il soit et chacun peut croire qu’il est vu là où il est situé, il est vu par Jésus même s’il est mal vu par les hommes.
Mieux encore, l’amour de Dieu n’est pas donné qu’à ceux qui le méritent, comme s’il avait été dit à Zachée : « Convertis-toi d’abord, deviens vertueux, et je viendrai manger chez toi. Tu seras aimé parce que tu l’as mérité ».
L’amour de Dieu, parce qu’il est infini, est gratuit. Seule condition : vouloir le recevoir. Zachée aurait pu refuser de recevoir Jésus chez lui. Là était la condition pour bénéficier de cet amour. Peut-être ce Juif s’est-il rappelé les prophètes qui faisaient dire à Dieu : « Tu étais encore dans le sein de ta mère que déjà je te connaissais par ton nom » et encore « Tu as du prix à mes yeux et moi je t’aime ».
Une morale étonnante
Alors, « la morale de cette histoire » ? Serait-ce qu’on peut faire n’importe quoi et être l’ami de Dieu ? Pas vraiment. A la fin du repas, parce qu’il a été « retourné » par cet amour gratuit et non mérité, Zachée exprime un véritable « retournement » (c’est le mot « conversion »). C’est parce qu’il a été aimé que Zachée a converti sa vie. Ce n’est pas l’inverse.
Zachée : les personnages principaux
Zachée
Il s’agit d’un chef de publicains. Ces derniers étaient considérés par les Juifs comme des collaborateurs des Romains. Ces collecteurs d’impôts passaient pour être malhonnêtes, ce qui cadre mal avec la signification hébraïque de son prénom zakkay, « pur, irréprochable ».
Qui étaient les publicains ?
Ils bénéficiaient de contrats par lesquels ils fournissaient l’armée romaine, géraient la collecte des taxes portuaires et supervisaient les projets de constructions publiques. Ils exerçaient également comme collecteurs d’impôts pour le compte de l’Empire Romain. Ils devaient faire l’avance des sommes à collecter et recouvrer leurs fonds sur les taxes qu’ils prélevaient.
Organisés en « collèges », ils constituaient à ce titre un ordre puissant. Sous l’Empire, les publicains étaient perçus le plus souvent comme des collecteurs d’impôt par les habitants des provinces. Avec la croissance de l’administration impériale, leur rôle dans ce domaine aussi bien que leur importance en général déclina très rapidement.
Zachée : situation géographique
Jéricho, est une ville située à une vingtaine de kilomètres au nord-est de Jérusalem, et dont le nom se trouve mentionné dans des écrits datant de 1800 av. J.-C. Grande oasis arrosée par trois sources, c’est à la fois un site agricole, commercial et stratégique, ce qui a souvent inscrit cette ville dans l’histoire, depuis les toutes premières civilisations urbaines du mésolithique (âge moyen de la pierre, il y a environ 10 500 ans !). Des fortifications datant du bronze moyen (-1500 à -1200) y ont même été découvertes.
Les ruines d’un vaste palais érigé au temps d’Hérode le Grand, ont été fouillées au milieu du XXe siècle, révélant qu’à la fin de son règne, la construction a été incendiée en partie, et s’est beaucoup dégradée au fil du temps. C’est probablement l’état de délabrement qui a servi de toile de fonds au récit de Zachée à Jéricho. Par ailleurs Jéricho est présente dans plusieurs récits de l’Ancien Testament, notamment lors de l’entrée des Hébreux en terre de Canaan, territoire situé entre la Méditerranée et le fleuve du Jourdain et la prise de la ville.
Rebâtie sous le règne du roi Achab sur Israël (entre 907 et 888 av. J-C), la ville est également le théâtre de la guérison d’un aveugle (Évangiles de Luc et de Marc) ou de deux aveugles (Évangile de Matthieu), se trouvant eux aussi sur le chemin du Christ.
Zachée : vidéo
Zachée est ce petit homme qui monte dans un arbre pour mieux voir ce Jésus dont on parle tant en Israël.
Zachée, c’est aussi ce « collaborateur » au service des Romains, dont la vie est en danger.
Zachée et Jésus, c’est l’histoire d’une rencontre qui va changer profondément son existence.
C’est ce que nous explique Eric de Nattes, prêtre du diocèse de Lyon :
Zachée : méditation
« Zachée descends vite, aujourd’hui il faut que j’aille demeurer dans ta maison ». Oui Zachée, descends, je t’ai vu. Tu n’as plus besoin de monter sur l’arbre, c’est moi qui viens chez toi. Oui, descends vite, c’est une urgence. Il faut que je demeure chez toi, c’est une nécessité. C’est aujourd’hui que je viens te rencontrer. Je viens chez toi, et je viens en toi pour y faire ma demeure.
Oui, Seigneur, je descends. Je descends de mon arbre, je n’ai pas besoin de me mettre plus haut que je ne suis pour te rencontrer. Je suis petit, mais tu t’es fait petit. Je suis méprisé par les gens à cause de mon métier, mais tu ne me regardes pas de haut. J’ai peut-être mal acquis mon argent, mais tu ne me le reproches pas. Tu t’invites chez moi, alors oui, je descends vite. Et tu vas voir : je ne serai plus le même homme.
Viens chez moi, Seigneur, viens habiter ma maison, viens habiter mon cœur, viens habiter ma vie. C’est toi qui peux la transformer, non à coup de remontrances et de leçons de morale, mais en me permettant de me voir avec tes yeux qui aiment. Si je suis petit, moralement ou physiquement ou intellectuellement, ton regard me grandit. Si j’ai des choses à me reprocher, ton regard va plus loin que mon péché. Je suis condamnable, certes, mais surtout sauvable. Car sur mon front il n’y a pas écrit pécheur, mais enfant de Dieu.
Thierry BRAC de la PERRIERE
Évêque de Nevers